Quand Liverpool voit rouge…
Le duo américain Tom Hicks et George Gillett, propriétaire du club de la Mersey depuis 2007, a décidé de jeter l’éponge, mais en y mettant les formes, comme ils l’ont déclaré en avril dernier dans un communiqué commun : « Porter le club aussi haut a été une expérience excitante et enrichissante. Nous voulons le vendre à des propriétaires susceptibles de franchir la prochaine étape ». En d’autres termes, la plaisanterie a assez duré, la dette du club atteint des sommets (350 M€) et, sportivement, les "Reds" ne font même plus partie du fameux « Big four » qui se dispute le titre de Champion d’Angleterre et les places qualificatives pour la très lucrative Ligue des Champions. Le club mythique est donc à vendre depuis le mois d’avril, et, pour ce faire, les américains ont laissé les rennes à Martin Broughton, le président intérimaire, également président de British Airways à ses heures perdues.
Une proie qui attise les convoitises
C’est donc lui qui voit roder autour du club, depuis avril, les investisseurs étrangers en quête de sensations fortes et de fantasmes, dans l’indifférence générale des fans, totalement blasés des atermoiements de l’équipe dirigeante depuis 3 ans.
Entre fantasmes et rumeurs, les nouvelles les plus diverses circulent : quand ce n’est pas un nouveau fond d’investissement américain basé à New York (Rhône Capital), c’est un membre de la famille royale du Koweit qui est pressentie, puis un consortium canadien et saoudien dirigé par un syrien, Yahya Kirdi. Et pendant ce temps, la dette ne cesse de s’alourdir et le club plonge en pleine crise financière et sportive. A tel point que les propriétaires s’impatientent grandement et ont fixé, par l’intermédiaire de Martin Broughton, une "dead line" définitive : le 31 août le club aura changé de mains !
C’est dans ce contexte qu’un nouveau prétendant est apparu, bien différents des 14 autres clubs de Premier League (sur 15) qui sont à la recherche de nouveaux investisseurs et d’argent frais susceptible de surmonter la crise financière sans précédent qui frappe le football d’outre-manche (selon le cabinet d’audit Deloitte, la dette globale de l’élite du football anglais atteindrait, en 2009, les 3,6 milliards d’euros…).
Le péril rouge menace la Mersey
En effet, un certain Kenny Huang tiendrait actuellement la corde pour le rachat du club. Ancien trader de Wall Street, aujourd’hui implanté à Hong Kong, ce richissime chinois est à la tête du fonds d’investissement QSL Sports, qui ne serait rien d’autre que la "patte blanche" d’un fonds gouvernemental chinois, CIC (China Investment Corporation), dont le but est d’investir dans les sociétés étrangères, et qui, à ce titre, possède plusieurs centaines de milliards d’euros de liquidités.
Le stade de la simple déclaration d’intentions aurait même été franchi puisque, selon le quotidien britannique The Guardian de ce week-end, le fonds chinois aurait vendu les 9% du capital qu’il détenait dans la banque Morgan Stanley pour 351,4 M£, soit au centime près la dette du Liverpool FC auprès de la Royal Bank of Scotland… Sur ces entrefaites, Martin Brought a alerté les dirigeants de la Premier League, comme l’exigent les nouvelles règles en vigueur, qu’une reprise du club était imminente.
Si l’affaire se concluait, ce ne serait autre que le gouvernement de la République Populaire de Chine qui se retrouverait à la tête du quintuple Champion d’Europe. En effet, Kenny Huang, déjà coprésident des Ligues Nationales de Basket et de Baseball chinoises, est surtout, comme on l’a déjà dit, le représentant réel du fonds d’investissement CIC, créé en 2007 par Pékin pour gérer les réserves financières de la République Populaire, soit 250 milliards d’euros de liquidités à investir dans les marchés financiers traditionnels, mais aussi dans des actifs alternatifs dans le but d’en tirer des bénéfices pour le compte de l’Empire du Milieu.
Le quotidien The Times ne s’y est d’ailleurs pas trompé ce week-end en précisant que l’acquisition de Liverpool « ne représente qu’une toute petite partie du vaste plan mondial d’investissement de la Chine ».
Liverpool, déjà jumelée avec Shanghaï, deviendrait ainsi le fer de lance de la politique aguicheuse de Pékin vis-à-vis de l’Occident, et une formidable porte d’entrée sur le marché chinois pour un club à la réputation internationale qui n’est plus à faire, avec les retombées commerciales que cela induit…
Où comment illustrer, une fois de plus, que le football est le véritable "opium du peuple" !
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